Choisir un logiciel géospatial, c’est comme comparer des pommes avec des oranges
Récemment, un rapport a vu le jour sur le Web — généralement une source très fiable, n’est-ce pas? — qui énumérait les « Meilleurs logiciels de systèmes d’information géographique (SIG) ». Le rapport de SoftwareReviews a classé 20 solutions logicielles considérées comme les meilleurs choix et a présenté un guide de l’acheteur expliquant, pour chaque produit logiciel, l’expérience client (CX), l’empreinte émotionnelle et la propension du client à le recommander.
Pour toute personne qui ne connaît pas bien la technologie géospatiale et qui cherche une ressource pour l’aider à acheter une solution, nous vous conseillons de vérifier si le rapport provient d’une source fiable. Vous devez faire preuve de prudence lorsque les rapports présentent des listes des « meilleurs » ou des « scores CX les plus élevés ». Les évaluations, comme celles mentionnées ci-dessus, ne tiennent pratiquement pas compte de la fonctionnalité et ne permettent pas de déterminer si le logiciel est adapté aux objectifs de votre entreprise. L’un des critères utilisés dans le rapport susmentionné est « Caractéristiques du produit et satisfaction ». Ce dernier est mesuré « en combinant la satisfaction des utilisateurs concernant les principales caractéristiques à la probabilité que les utilisateurs recommandent ce logiciel ». Relisez attentivement cette phrase. Elle indique « principales caractéristiques », mais quelles sont ces principales caractéristiques? Est-ce la visualisation de cartes, la capacité à faire des requêtes, la disposition des cartes ou la symbolisation cartographique? Difficile à dire et ça ne permet pas de les identifier précisément.
L’éléphant dans la pièce
D’une part, ce rapport présente des contradictions évidentes en ce qui concerne le classement des produits. Historiquement, d’autres études de marché ont systématiquement reconnu Esri comme le chef de file dans le domaine des produits SIG, et ArcGIS comme la solution logicielle géospatiale la plus utilisée. Peu importe ce que vous pensez d’ArcGIS et que vous soyez un utilisateur ou un concurrent, le classement de ce rapport seulement serait suffisant pour écarter l’étude en entier. ArcGIS, le produit d’Esri, est classé sixième au total, soit le troisième plus faible en ce qui a trait aux caractéristiques du produit et le deuxième pire en matière d’expérience du fournisseur. Il a également une « empreinte émotionnelle » inférieure à celle de GE SmallWorld. Dans la catégorie « Expérience du fournisseur et capacités », les attributs fiable, respectueux et juste sont également considérés. Esri a été classé au quatrième rang. Dans la catégorie « Satisfaction relative aux fonctionnalités du produit », Esri a été classé au sixième rang.
Prenez maintenant le critère « empreinte émotionnelle ». Si vous avez déjà participé à une conférence des utilisateurs d’Esri (UC), vous savez que c’est un véritable festival de l’amour pour les SIG et que toute cette émotion est dirigée vers l’entreprise qui a soutenu le développement de la mise en application de cette technologie pendant plus de 50 ans. Si le classement est basé sur la rétroaction des utilisateurs, les auteurs du rapport n’ont assurément pas interrogé les utilisateurs d’ArcGIS. Aucune solution n’est parfaite, et certainement pas ArcGIS, mais c’est une suite de solutions logicielles extrêmement fonctionnelle et performante. L’entreprise est incontestablement le chef de file sur le plan des SIG.
Pourquoi ce rapport est-il biaisé?
Des rapports comme celui-ci sont incroyablement trompeurs face à ceux qui effectuent des recherches sur les technologies géospatiales.
Étudions le rapport plus en profondeur.
Éléments manquants
Premièrement, le rapport est incomplet, car il ne contient pas de données sur deux des solutions de cartographie sur ordinateur les plus populaires et les plus utilisées : MapInfo Pro et QGIS. MapInfo, qui a été lancée en 1986, a été l’objet d’une amélioration constante et des mises à jour de ses versions ont lieu depuis ce temps. En fait, une nouvelle version de MapInfo Pro a été lancée en octobre 2021. Sa facilité d’utilisation a souvent été mentionnée comme l’une de ses principales qualités. Pour ce qui est de QGIS, son empreinte émotionnelle devrait être exceptionnelle. Ses fidèles utilisateurs et développeurs en ont fait la plus importante technologie géospatiale ouverte. L’éventail de fonctionnalités de QGIS en a fait l’un des produits favoris des gouvernements locaux, qui apprécient son faible coût initial.
Deuxièmement, le rapport exclut Google, dont la plateforme de cartographie et les API sont les plus utilisées actuellement, et dont les données sont utilisées par les développeurs d’applications partout dans le monde. Cependant, si Google avait été inclus, HERE Technologies aurait également dû l’être. La plateforme de cartographie et les API de HERE sont des produits clés dans le domaine de la logistique et du transport, et sont maintenant utilisés comme données de cartographie de base pour les systèmes d’aide à la conduite automobile.
En résumé, étant donné que le rapport ne comprend pas deux des solutions logicielles les plus utilisées, comme MapInfo Pro et QGIS, ainsi que les principales plateformes de cartographie Google et HERE, comment les lecteurs peuvent-ils considérer ce rapport comme une base fiable pour investir dans une solution logicielle ou un portfolio de données?
Comparez en fonction de vos objectifs commerciaux
D’autre part, vous devez tenir compte du fait que ce rapport ne reconnaît pas qu’il est essentiel de comparer des solutions logicielles en fonction du problème ou de l’objectif commercial pour lequel chacun est le mieux équipé. CARTO et Mapbox sont d’excellentes solutions pour les utilisateurs qui veulent personnaliser leur analyse et le résultat de leur carte. AutoCAD Map 3D est, comme son nom l’indique, soutenue par la conception assistée par ordinateur (CAO) et la technologie d’ingénierie d’AutoCAD. Elle permet de rendre des cartes en 3D et prend en charge la modélisation des données du bâtiment (BIM). Les solutions géospatiales de Bentley System sont aussi très recherchées pour réaliser de vastes projets d’ingénierie pour lesquels des modèles BIM seront utilisés et partagés entre les firmes d’architectes, d’ingénierie et de construction. SmallWorld GIS de GE est une solution logicielle de gestion des services publics (gaz, eau, électricité) qui est utilisée, comme vous vous y attendez, par les grandes entreprises d’énergie et de services publics.
Si vous avez l’impression que la comparaison des solutions logicielles évaluées dans ce rapport est un peu comme si l’on comparait des pommes avec des oranges, vous avez raison. Il indique un niveau d’ignorance quant aux différences entre chaque solution. Le problème avec ce rapport en particulier, c’est qu’il met toutes les solutions SIG dans le même panier. Par conséquent, il a de la valeur uniquement dans la mesure où il reconnaît « certains » des produits sur le marché, sans toutefois les différencier en fonction de leur philosophie de conception et des principes d’affaires selon lesquels ils ont été développés.
Cinq entreprises innovatrices en matière d’intelligence géospatiale
Bien qu’elle ne se trouve absolument pas dans la même catégorie que le rapport de SoftwareReviews, l’IDC, une entreprise d’études de marché beaucoup plus réputée, a récemment présenté une liste de « Cinq entreprises innovatrices offrant des solutions d’intelligence géospatiale ». Les entreprises nommées sont CARTO, Capella Space, Inpixon, IQGeo et xyzt.ai. Ici, chaque entreprise offre également des technologies très variées. CARTO est une plateforme de cartographie, Capella Space fournit de l’imagerie radar à antenne synthétique, Inpixon offre une solution permettant d’intégrer des données de cartographie intérieure, IQGeo se concentre sur la prestation d’une solution pour les services publics et l’industrie des télécommunications, et enfin, xyzt.ai offre une plateforme pour analyser et réduire de grands volumes de données géospatiales.
En effet, toutes ces entreprises peuvent être considérées comme innovatrices puisqu’elles offrent des solutions dans le vaste spectre de la technologie géospatiale. Toutefois, elles ne devraient pas être comparées. Selon le communiqué de presse de l’IDC, « les rapports d’IDC Innovators présentent un ensemble de fournisseurs — avec des revenus de moins de 100 millions de dollars au moment de la sélection — choisis par un analyste de l’IDC dans un marché précis qui offre une nouvelle technologie novatrice, une approche révolutionnaire à un problème existant ou un nouveau modèle d’affaires intéressant. Il ne s’agit pas d’une évaluation exhaustive de toutes les entreprises d’un segment ou d’un classement comparatif des entreprises ».
Le rapport de l’IDC fournit des informations sur la spécialité technologique ou en matière de données qu’offre chaque entreprise. L’IDC ne fait pas de comparaison et ne donne pas d’opinion. L’objectif est plutôt d’orienter l’utilisateur vers une technologie qui vaut la peine d’être considérée, si celui-ci en a besoin. L’IDC peut fournir un rapport sur les cinq entreprises moyennant des frais.
Vers qui se tourner pour obtenir une expertise géospatiale
L’objectif de présenter chaque rapport ici est de démontrer un défi grandissant auquel de nombreuses entreprises sont confrontées lorsqu’elles apprennent à tirer profit des données de localisation et de la technologie géospatiale. Comme nous le savons, chaque transaction par carte de crédit, chaque identification ou connexion sur une application de médias sociaux, et chaque recherche pour les plus récentes prévisions météorologiques permettent de recueillir des données de localisation. Les données géospatiales sont extrêmement utiles pour de nombreuses industries, mais le choix des données, des logiciels et des solutions à utiliser représente un défi, particulièrement lorsque les entreprises n’ont pas suffisamment d’expertise pour bien comprendre toutes les informations.
La solution consiste à faire affaire avec un consultant indépendant qui a une approche agnostique pour aider les entreprises à prendre des décisions beaucoup mieux informées. Vous devriez également choisir un consultant qui a suffisamment d’expérience pour réduire la complexité des logiciels géospatiaux et des données à utiliser, mais qui possède aussi des connaissances sur l’intégration de solutions au sein de l’infrastructure de TI principale de l’entreprise. Actuellement, les volumes de données de localisation recueillies représentent un défi en ce qui concerne la conception d’un environnement infonuagique natif qui prend en charge le traitement de données géospatiales. Ce défi n’est pas présent dans le rapport de SoftwareReviews, mais est un élément extrêmement important qui est parfois mal compris par les entreprises qui font d’importants investissements dans le domaine de la technologie géospatiale.
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